Point de fuite - Mon baptême de sourde

Mars 2022

Mon baptême de sourde

Par Julien Cadieux et Isabelle Rhéaume

La réalisatrice Emilie Peltier, vit depuis longtemps avec une surdité qu’elle a longtemps cachée. Elle avait le désir, dans son parcours d’acceptation, de faire découvrir la communauté sourde par le biais d’un documentaire. Méconnue, cette communauté est dynamique, créative et milite pour la reconnaissance de la langue des signes, pour l’accès à l’information et pour avoir le choix lorsqu’il est question d’appareillage et d’implant cochléaire.

Faisant elle-même partie de cette communauté, il est devenu évident à mesure que la scénarisation et la préparation au tournage avançaient, que cette réalité servirait à aller à la rencontre de protagonistes inspirants et charismatiques, détruisant ainsi les stéréotypes rattachés à la surdité.

Un long parcours

En suivant Emilie Peltier à travers ce documentaire unique de 60 minutes, les spectateurs (re)découvriront l’existence et la richesse de la culture sourde. Emilie est née en France et y a vécu jusqu’à l’âge de 18 ans. Diagnostiquée sur le tard à l’âge de onze ans, on découvre qu’elle a une malformation de l’oreille interne, mais rien n’est vraiment entrepris pour combler ce déficit. Emilie termine ses études avec difficultés et part vivre à l’étranger. Après avoir vécu dans différents pays, elle immigre au Canada en 2012.

À son arrivée à Moncton, Emilie rencontre par hasard Charles Gaucher, un anthropologue et spécialiste en communautés sourdes. À leur première rencontre, il démasque sa surdité et le fait qu’elle cache son identité. Il l’inspirera à faire la paix avec sa surdité. Parce qu’elle a grandi avec un rapport à la surdité complexe, ce n’est qu’à 40 ans qu’elle décide de tout faire pour définir cette nouvelle identité. En 2020, elle réalise le court métrage Matin Ecchymose qui allie poésie et langue des signes.

 

Elle décide alors de déménager à Montréal où une communauté sourde est existante et effervescente. Le documentaire la suit pendant son déménagement. En se trouvant un emploi dans un réseau surdité de la grande région de Montréal, elle y fait la rencontre d’artistes sourd.e.s qui lui ouvriront des portes à faire plus de rencontres. Elle s’inscrit à des cours spécialisés en commençant par des cours de langue des signes québécoise (LSQ) et un cours sur la sourditude à l’UQAM.

Toutes ces nouvelles rencontres aident Emilie à déconstruire les clichés vis-à-vis la différence physiologique et culturelle de la surdité. Dans son nouveau quartier vit Marie-Andrée Boivin, qui fut la première enfant avec un implant cochléaire au Canada dans les années 80. Son expérience a créé beaucoup de rejet des autres enfants sourds et de la communauté sourde en général. On y en apprend beaucoup sur les difficultés de gens vivant avec une surdité et les différences entre ceux implantés, ceux qui parlent (oralistes), ceux qui signent, ceux qui ne signent pas, ceux implantés et ceux appareillés.

C’est ainsi qu’Emilie découvre mieux où elle se situe dans cette nouvelle communauté et qu’elle sera baptisée avec son nom signé.

Julien Cadieux et Emilie Peltier

Une coréalisation fructueuse

Julien Cadieux, réalisateur, connaît Emilie depuis plusieurs années puisqu’elle a travaillé aux communications pour le FICFA et a fait partie des membres du FRIC. Par contre, ce n’est qu’en découvrant sa proposition de documentaire qu’elle à développé avec Mélanie Léger (également membre du FRIC) qu’il a su qu’elle vivait avec la surdité. Elle avait réussi à cacher cette réalité. Julien a donc voulu s’engager à en découvrir davantage sur la réalité des personnes sourdes et malentendantes.

Les deux réalisateurs ont donc uni leurs forces pour créer un film lumineux, inspirant à la découverte de la richesse de la communauté sourde. Cette coréalisation s’est transformée en une belle amitié et collaboration.

Documentaire Mon baptême de sourde

Une communauté tissée serrée

Les intervenants présents dans le documentaire sont tous des gens impliqués dans la communauté sourde et qui ont croisé la route d’Emilie. En plus d’être des gens inspirants, ils démontrent les divers visages de la surdité. Certains utilisent la langue des signes, oralisent, sont implanté ou ont des appareillages.

Les membres de l’équipe de tournage ont même eu droit à une courte formation en lange des signes québécois.

 

Les défis de la pandémie

En tant de Covid, beaucoup des activités sociale et culturelle de la communauté sourde ont été annulées. Ces activités auraient permis à Emilie de faire de nouvelles rencontres dans la communauté sourde et faciliter son intégration dans sa nouvelle ville. Puisque le film suit son cheminement, ces contacts étaient importants pour qu’elle puisse tisser des liens dans le film comme dans la vraie vie. Heureusement, grâce à sa personnalité chaleureuse, Emilie a été en mesure de trouver des gens sourds, accueillants et bienveillants rapidement.

Il était important que le film qu’il puisse rejoindre le plus de gens possible, dont les gens vivant avec une différence visuelle ou auditive. L’équipe a donc trouvé une façon originale et personnelle d’intégrer une vidéodescription au rôle de réalisatrice que porte Emilie dans le film. Elle est également très fière que le film soit signé par un interprète en LSQ (langue des signes québécoise) pour les gens qui utilise ce mode de communication.

Les tournages ont eu lieu à Moncton et à Montréal. Le documentaire sera en ligne dès le 2 avril sur le site d’Ami-télé et la diffusion télé aura lieu la semaine du 9 avril. Une diffusion est également prévue plus tard sur Unis.tv.

Affiche Mon baptême de sourde

Membres de l’équipe :

Réalisation : Emilie Peltier et Julien Cadieux

Scénario : Emilie Peltier et Mélanie Léger

Producteur : René Savoie

Directeur de production : Xavier Leger

Directeur de la photographie : Bernard Fougère

Preneur de son : Georges Hannan

Montage : Julien Cadieux

Montage sonore : Dennis Morton